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dimanche 15 février 2015

Chapitre 2 suite et fin : Et si l'absence de retour durable de la croissance était une bonne nouvelle ?


Il n’y a donc pas que la croissance pour donner un coup de pouce à l’économie en matière d’investissement, d’emploi et de baisse de la dette publique, surtout dans la perspective d’une société plus économe et plus humaine. Dominique Meda, la Philosophe et Sociologue française auteure de l’essai sur « La mystique de la croissance », plaide pour la sortie de cette logique capitaliste. Si tous les économistes ne sont pas encore convertis, la contrainte environnementale devrait très vite leur faire comprendre cette nouvelle limite. Si la croissance a apporté de très nombreux bienfaits, elle a également produit de nombreux maux que nous avons passés par « pertes et profits ».
Au cours du siècle dernier, le monde a connu une très forte croissance démographique et de production par habitant, comme elle n’avait jamais existé et comme il n’en existera certainement plus jamais. Nous avons vécu une période extraordinaire. Le XXIème siècle retrouve une double croissance plus mesurée et plus ajustée à la capacité d’absorption de la planète, en dehors du continent africain. La croissance démographique est déjà redescendue en dessous d’1% par an et la croissance de la production par habitant va être de l’ordre de 3  à 3,5% jusqu’en 2050 puis baisser à environ 1,5%. Il n’y a rien là de choquant et de dangereux pour la planète, si les pays riches maîtrisent leur consommation énergétique et si les pays émergents rattrapent leur retard en maîtrisant mieux leur croissance démographique. Le retour de la croissance vécue lors des Trente Glorieuses n’est pas prêt d’arriver. La croissance est tendanciellement en baisse, il est par conséquent temps que les responsables politiques qui nous dirigent cessent de l’espérer. Enfin, il est nécessaire de rappeler que le retour de la croissance contribuerait à aggraver la menace écologique. Notre réflexion collective doit se construire sur la durée, il est illusoire de croire qu’une baisse de quelques centaines de milliers de chômeurs nous dégagera un horizon plus clément. La reconversion écologique, grâce à la transition énergétique et à la révolution numérique, est le seul moyen de retrouver des marges en terme d’employabilité.
Encore une bonne raison pour oublier ce court-termisme dévastateur et s’il faut accepter une stagnation ou même une aggravation de la situation de l’emploi pour le bien-être à venir de la planète et des générations futures, il ne faut en aucune façon hésiter. Cette décision courageuse doit nous amener simultanément à gérer socialement ce chômage technologique par plus de solidarité et d’altruisme. Nos responsables politiques doivent avoir le courage d’expliquer que la croissance n’est plus la solution à tous nos maux. Sans celle-ci, il est nécessaire de réduire véritablement le temps de travail (et pas renouveler les erreurs des 35 heures) ou la productivité du travail. Ce choix cornélien n’ayant pas été réalisé au cours de cette dernière décennie, on a renforcé par conséquent le chômage.
Cette absence de croissance doit être une occasion unique de changer de paradigme. De la séquence AVOIR -à FAIRE -à ETRE, nous devons nous engager vers une séquence ETRE -à AVOIR -à FAIRE. Notre quête est de rechercher à être bien et ce avant d’imaginer ce qui nous permettrait de l’être et de faire en sorte de l’obtenir. Nous devons nous trouver dans un état positif et non de manque. Nous avons la responsabilité de construire autrement notre vie avec des approches idéologiques renouvelés, un développement économique durable et des outils de communication de plus en plus adaptés à cette prise de conscience. Le « toujours plus » n’est plus de mise, et la société qui se profile nous offre une alternative qu’il faudrait ne pas laisser échapper. La croissance productiviste qui engendre profits et richesses pour une minorité n’est plus la condition de bien-être et de progrès pour la majorité silencieuse.
La fin de l’économisme est devant nous, il est temps de créer un nouvel imaginaire en occultant quelque peu en sortant de la croyance que la satisfaction humaine prévaut sur l’équilibre entre la Nature et l’Homme. La finitude des ressources ne doit pas nous empêcher de construire ce nouvel imaginaire. Bien au contraire ! Nous avons trop transformé le monde, il faut maintenant le préserver.
« La fin du travail pourrait bien sonner le glas de la civilisation sous la forme que nous connaissons. Elle peut aussi annoncer l’avènement d’une immense transformation sociale et d’une renaissance de l’esprit humain. L’avenir est entre nos mains. »
 Jérémy Rifkin « La fin du travail »

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